Les controverses actuelles (avec plus ou moins de nuances sur les réseaux sociaux) sur l’application de la nouvelle certification #qualiopi marquent bien que l’on ne peut pas réduire la formation à un seul marché, vu par exemple côté opérateurs : petit organisme de formation (OF), réseau d’OF, gros OF, OF public ou privé, petit ou gros CFA, anciens et nouveaux centres de formation par alternance d’entreprises, APP, GRETA, MFR, AFPA, CCI, CMA, université, CIBC, indépendants, etc.
La formation professionnelle est multiple. Certains OF ont besoin de cette certification qualité, d’autres moins, d’autres pas du tout. Ils accueillent, accompagnent et forment une myriade de publics apprenants : demandeurs d’emplois, salariés plus ou moins qualifiés et ou diplômés, des grandes entreprises, des TPE/PME, des agents de la fonction publique, indépendants, des jeunes 16-25 ans, des détenus, des publics migrants et autres. Suivant les dispositifs mobilisés, les financeurs (Régions, Pôle emploi, OPCO, Caisse des dépôts, AGEFIPH, etc.) interviennent variablement. Dans le nouveau cadre réglementaire, on peut développer les compétences sans passer par des actions de formation, y compris par de l’évènementiel. Sans compter qu’il existe des actions de formations obligatoires, des actions de formation courte et longue, des actions de formation unimodale et multimodale et, enfin, que la plupart des actions de formation financées, avec des fonds publics ou mutualisés, doivent être certifiantes et/ou diplômantes (RNCP et RS). Il existe des exceptions comme, par exemple, pour la création d’entreprise, pour le plan de développement des compétences des entreprises de moins de 50 salariés et autres. Idem pour la modalité AFEST, non liée à une certification ou à une diplomation, le décret prévoit un «formateur assurant des fonctions tutorales» sans préciser s’il est externe (un formateur d’un OF, certifié ou non Qualiopi ou autre) ou interne (un salarié compétent, entendre sur son geste professionnel ou son métier). Le spectre d’activités des OF est donc large. D’où en grande partie, des regards différents et divergents sur les points forts et faibles de la démarche Qualiopi.
Qualiopi n’est pas obligatoire ; seuls les #opac (Organisme prestataire d’actions concourant au développement des compétences : OF-CFA-bilan de compétences, etc.) dont les dispositifs doivent répondre aux critères d’éligibilité des fonds publics ou mutualisés, doivent être certifiés. Or, dans un calendrier contraint, l’application de Qualiopi est quasi la même pour tous les Opac. Par ailleurs, on peut relever (pour certains acteurs de la formation) un manque de culture des fondamentaux qualité qui amène parfois à quelques exagérations. En parallèle, on peut noter du côté des acteurs de la qualité, un relatif manque de culture formation qui conduit quelques fois à certaines aberrations. Par ailleurs, la «formation» elle-même est en pleine évolution avec la nouvelle définition d’une « action de formation » possiblement multimodale (#foad et #afest) portée par une digitalisation multiple (du présentiel enrichi au présentiel inexistant, dixit « Compétice »), ses hybridations, ses dérivés et ses dérives, liées à certains abus.
Cette certification est, en soi, un marché en concurrence pour les certificateurs avec une régulation assurée par le COFRAC. Des prestations d’accompagnement à la certification (dont le choix du certificateur cofraqué) sont également aujourd’hui disponibles. La pertinence de la démarche de cette certification est liée d’une part, à son anticipation, sa préparation et son devenir et, d’autre part, à la prestation de l’auditeur-trice.
Somme toute, même si on relève une contradiction forte sur l’application d’une démarche qualité en formation [où l’implication du bénéficiaire (apprenant) et l’engagement du commanditaire sont déterminantes sur la qualité de la prestation], on doit préciser que la démarche Qualiopi ne certifie pas à 100% la qualité d’une prestation. Comme tout système, il n’est pas infaillible. Par la prise en compte de 32 indicateurs, la démarche Qualiopi vise l’amélioration continue pour une meilleure professionnalisation. Aussi, elle nous semble intéressante sous certaines conditions :
– L’existence d’un dialogue constructif et de confiance entre audité et auditeur, et surtout, selon la taille de l’OF, entre responsable et membres des équipes pédagogiques pour initier ou conforter une démarche de progrès coordonnée.
– La mise en œuvre d’une démarche collective centrée sur la maîtrise de la double dimension fondamentale individualisation-personnalisation, tout en préservant et encourageant la liberté, la créativité, l’adaptabilité de l’acte pédagogique (côté appreneur) et de l’acte d’apprendre, toujours singulier et complexe (côté apprenant) dans des interactions adaptées, évolutives et diversifiées.
– Un travail d’interprétation éclairé et éclairant à réaliser par les différents acteurs pour positionner les indicateurs du référentiel Qualiopi dans la chaîne des processus d’analyse et de détermination des besoins, de conception, de réalisation, de suivi et d’évaluation des actions de formation. En contexte, il s’agit de donner du sens à tous ces indicateurs.
De notre point de vue, Qualiopi est aussi une opportunité en vue de valoriser des pratiques innovantes multimodales comme des parcours #foad et #afest pour, au final, proposer des solutions apprenantes souples aux besoins des apprenants et des territoires (#apprenance).
Deux prochains RDV en ligne (en direct ou en différé) pour aller plus loin :
– avec l’APapp – Association pour la Promotion du label APP et son double label : APP + Qualiopi : le 24 mars 2021 à 14h00
– avec le FFFOD, le forum des acteurs de la formation digitale le 8 avril à 11h30.
Les auteurs
Anne Duiker et Jean Vanderspelden